Une lettre de Jules Ferry aux
instituteurs en 1881, la loi du 28 mars 1882 puis une nouvelle lettre aux
instituteurs en 1883 enjoignent les maîtres à donner aux élèves une
« éducation morale et une instruction civique ». Un arrêté du 18
février 1887 stipule qu’il « y aura chaque jour, dans les deux premiers
cours, une leçon qui, sous forme d’entretien familier ou au moyen d’une lecture
appropriée, sera consacrée à l’instruction morale ». Cette morale laïque
est censée remplir le vide des cours de religion qui ne se tiennent désormais
plus à l’école (en dehors de l’Alsace-Moselle annexée à cette période). Elle
désigne un ensemble de comportements, d’usages en société que suivent tous les
citoyens, aptes à distinguer le bien du mal. L’amour de la patrie et l’adhésion
au régime républicain en sont les piliers. L’exemplarité en est le ressort.
L’enseignement moral entre dans
son âge d’or avec les programmes des années 20. D’après l’arrêté du 23 février
1923 :
Cours
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Âge
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Programme
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CP
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6-7 ans
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« Les leçons de morale (…) sont de simples dialogues, des contes
moraux, des biographies d’hommes illustres et la formation aux bonnes
habitudes »
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Cours élémentaire
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7-9 ans
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« Des entretiens familiers, des récits, des fables, contes
moraux, des lectures avec explication »
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Cours moyen
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9-11 ans
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« Des lectures et des entretiens sur les principales valeurs
individuelles (tempérance, amour du travail, sincérité, modestie, courage,
tolérance, bonté…) et sur les principaux devoirs de la vie sociale (la
famille, la patrie). »
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Cours supérieur
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11-13 ans
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« Instruction morale et civique » : conscience et
caractère, éducation de soi-même, justice, solidarité, organisation
politique, administrative et judiciaire de la France, le citoyen et ses
droits et devoirs ».
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Mais c’est surtout à l’époque de
Vichy que la morale connaît son apogée. Elle remplace l’instruction civique, et
dicte les comportements. Elle indique les devoirs de l’enfant envers sa
famille, l’école, la patrie.
En 1978, les instructions officielles suppriment la leçon de
morale quotidienne à l’école.
En 2008, les programmes font
réapparaître la morale, et l’associent à l’instruction civique (sans la
confondre avec cette dernière toutefois). La morale y est définie comme un
ensemble d’usages en société que les élèves doivent s’approprier pour espérer
dans un second temps pouvoir exercer un jugement moral. Le développement moral
de l’enfant fait l’objet d’un développement particulier dans la circulaire de
2011 : le but est d’amener les élèves des stades préconventionnels de la
morale (obéissance par crainte de la punition de 2 à 6 ans, intérêt personnel
de 5 à 7 ans) aux stades conventionnels (relation à l’autre et vie sociale de 7
à 12 ans, respect de normes sociales de 10 à 15 ans, selon le psychologue
américain Lawrence Kohlberg, qui identifie des stades post-conventionnels
lorsque qu’un enfant se préoccupe du bien-être d’autrui et/ou/puis sait
réfléchir à des principes universels).
Enfin, en 2013, Vincent Peillon
place la morale laïque comme un élément de la refondation de l’école. Un
nouveau programme d’EMC est annoncé pour 2015 sous ce libellé « Enseignement
moral et civique ». Il n’est plus question de construire un catéchisme
républicain pour panser les maux de la société, mais d’expliquer le bien-fondé
du socle des valeurs communes : liberté, égalité, dignité, solidarité,
laïcité, justice, tolérance, respect de tous, lutte contre toutes les discriminations.
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